Introduction à la sociologie
Terme relativement récent, créé par Auguste Comte en 1839. Science voisine de l'économie et de l'histoire.
Économie et sociologie : 2ème moitié du XXe siècle ce sont des sciences distinctes car elles appréhendent l'humain à un niveau différent (homo economicus et homo sociologiques), cad entre comportements rationnels et irrationnels. Mais cette distinction n'a pas toujours eu lieu, et la sociologie moderne tend à la rejeter.
Histoire et sociologie : la distinction n'est pas évidente, mais on peut dire que la sociologie commence par une étude portant sur les raisons d'être d'un phénomène macrosocial.
La deuxième caractéristique de la sociologie est son aspiration à la généralité. 3 formes distinctes :
1/ Recherche de lois générales
2/ Recherche de lois évolutives
3/ Recherche de modèles structurels
Définition de la sociologie selon Raymond Aron : "la sociologie est l'étude qui se veut scientifique du social en tant que tel". La réflexion sur la vie sociale a été à travers l'histoire l'une des orientations permanente de la pensée occidentale. Cette science s'étend sur deux millénaires et commence avec Thucydide et Platon.
Première partie / Approche historique de la pensée sociologique Chapitre I/ Histoire de la pensée sociologique jusqu'à la fin du 18è siècle
Section 1/ L'antiquité grecque et la genèse de la pensée sociologique
1/ La cité grecque, creuset de la pensée sociologique
Fin Vé siècle activité intellectuelle intense, surtout en philosophie et mathématique. Naissance également de la "sociologique" par de nombreux penseurs. C'est le résultat notamment de la collaboration intervenue entre les principales cités au temps des guerres médiques (Marathon 490 et Salamine 480) : remise en cause de l'idée selon laquelle la loi de chaque cité est le reflet d'une loi divine unique, or si le Nomos ne résulte pas d'une loi divine il est le produit de conventions entre les hommes. Ce fut la conclusion des sophistes, philosophes athéniens.
Hérodote (-485 ; -420), après avoir visité l'Egypte, a laissé un témoignage et une analyse très sociologique sur l'articulation entre les croyances, les institutions, les coutumes, les mœurs. Il a démontré un parallélisme entre la hiérarchie des dieux et celle des hommes. Mais la pensée sociologique est plus nette avec 3 autres auteurs :
2/ Thucydide
(-460 ; -395), Athénien, auteur de 'Histoire de la guerre du Péloponnèse". Présente une véritable théorie de l'impérialisme au sens politique : les conquêtes impliquent que les cités extérieures à l'alliance sont contraintes par la violence à y entrer, structure dynamique dont la logique s'impose à tous, y compris aux chefs comme aux citoyens. Or pour Thucydide cette logique entraîne un effondrement fatal lorsque le développement de la structure sera devenu trop excessif. Pour lui c'est la raison qui a perdu Athènes.
3/ Platon
-428 ; -347. Influencé par la guerre du Péloponnèse, avec conflit idéologique également entre la démocratie d'Athènes et l'aristocratie de Sparte. Il est en recherche d'une organisation rationnelle et stable de la cité, sa sociologie sera principalement normative.
Platon part de principes abstraits, appelés Idées, dont on ne connaît que les choses qui se manifestent par nos sens, le monde sensible. Allégorie de la Caverne et méthode de la pensée dialectique, outil intellectuel pour connaître la "lumière".
A/ La République
Expose une conception de la cité parfaite, qui n'existe pas sur terre mais dans le monde des Idées. Deux aspects : analyse des fonctions sociales calquées sur celle de l'âme humaine et une théorie de l'évolution des régimes politiques et sociaux.
A/ analyse des fonctions sociales calquées sur celle de l'âme humaine
Pour lui l'âme est composée de la raison, du cœur et du désir des choses matérielles. C'est la même chose pour la cité. Il faut donc, pur éviter toute explosion sociale, qu'elle soit parfaite et juste et que chacune de ces fonctions sociales soit confiée à une classe particulière, d'où la division en trois classes : artisans, guerriers et philosophes-rois.
B/ Typologie évolutive des régimes politiques et sociaux
Le régime de la cité idéale que l’on vient de voir est appelé aristocratique par Platon. Pour Platon, tous les autres régimes politiques sont des dégradations de plus en plus poussées de ce régime idéal
- La 1ère dégradation résulte de négligences ou d’erreurs dans la planification de l’eugénisme et dans les méthodes d’éducation.
- La 2e dégradation est due à l’accumulation des honneurs et provoque l’avidité.
- La 3e dégradation est due au fait que les riches vivent dans la mollesse
- La 4e et dernière dégradation est le moment où la liberté démocratique se confond avec la licence (pour Platon, démocratie égale anarchie)
Cette conception a influencé Platon avec sa loi cyclique de l’évolution des régimes politiques. C’est une conception qui, poussée à l’extrême, produira la doctrine de l’éternel retour
B/ Les lois
Il ne croit plus aux espoirs qu’il exprimait dans la République. Il va donc élaborer un projet de société présentant un compromis entre sa cité idéale et les régimes préexistants. Il prévoit un système politique et social dans lequel la classe des producteurs cesse d’appartenir à la cité. Quant aux citoyens, tous sont propriétaires reçoivent chacun selon une stricte égalité un lot individuel avec une résidence urbaine et une portion de terre agricole. A côté de cela, ils peuvent posséder un patrimoine, mais le rapport maximal des fortunes demeure fermé. La fortune du plus riche ne doit pas dépasser 4 fois celle du plus pauvre.
Sous l’angle sociologique, on trouve dans les lois (et aussi dans un dialogue appelé le Critias) toute une série de règles implicites relatives au moyen de garantir l’équilibre économique et politique d’une cité.
4/ Aristote
Aristote a été l’élève de Platon, fonde à Athènes le Lycée. Rompt avec l’idéalisme de son maître Platon. Il est d'accord avec lui qu’il faut raisonner (élaborer les discours avec un sens critique), mais ajoute qu’il faut simultanément expérimenter : défend une méthode expérimentale et inductive qui s’oppose à la méthode déductive de Platon.
A/ La méthode scientifique d’Aristote a/ Les formes générales
Le réel se présente à nous sous la forme d’une diversité apparemment incohérente, point de départ de la recherche vers un ordre de pensée cohérent
La notion de la « forme générale » : la réalité n’est pas seulement une multitude d’entités individuelles diverses, dans toute entité individuelle on distingue une forme générale (forme générale de l’homme, de la table, ou de la cité...). Ainsi, Aristote se rapproche de ce que Platon appelait les Idées, mais avec une différence capitale : pour Aristote, l’idée n’est pas séparée de la chose (de la réalité sensible). Pour lui, les formes générales (ou idées) sont dans les choses (mais en sont dégagées, au moyen d’un processus d’abstraction)
Substances premières : les individus et les choses singulières ; les substances secondes : les formes générales qui permettent le regroupement des entités individuelles en catégories.
Il devient possible de construire une pensée scientifique car la science n’est pas possible sur la seule réalité concrète (très diverse et mouvante), mais seulement au moyen du recours aux formes générales : « il n’est de science que générale ». D’où les deux éléments majeurs de la méthode aristotélicienne : l’observation et la dialectique.
B/ L’observation
Aristote a réalisé des études sur les coutumes barbares et sur les principaux E grecs de son temps (avec une mise en fiches de toutes les données, analysées et composées dans tous leurs aspects), une enquête sur Rome et à Carthage. Et il a étudié les prétentions territoriales des différents ???
C/ La dialectique
Moyen de découvrir les valeurs qui résident dans les choses (et de s’assurer qu’elles ne sont pas le fait de la subjectivité de l’observateur) par l’art de la discussion.
Le rôle de la dialectique aristotélicienne est de parvenir à une pensée scientifique. Aristote n’a pas le même mépris que Platon pour l’opinion pourvu qu’elle soit sérieusement exprimée et émane d’un spécialiste du problème. Idée du « juste milieu », les idées peuvent toujours être remises en question. La pensée d’Aristote est donc toujours en mouvement Aussi, a-t-on parlé, à propos d’Aristote, de « philosophie de l’inachèvement ».
B/ Le contenu de la sociologie d’Aristote a/ La conscience que toute chose est en mouvement
Il estime que parmi les éléments constitutifs de chaque être, de chaque chose, il y a la matière et la forme, mais aussi une cause motrice qui fait mouvoir et évoluer les choses, c’est la cause efficiente. Aristote compare la société à un être vivant. Comme lui, elle est soumise à la loi de la naissance et de la mort.
B/ La continuité des sociétés humaines ???
C/ l'influence de la démographie sur le social et le politique
Aristote reproche à Platon de n’avoir pas prévu un système suffisamment rigoureux de limitation des naissances : les enfants en surnombre n’auront pas accès à la propriété du sol (ne posséderont rien du tout), préconise de réduire les naissances plutôt que de limiter la propriété d/ Une typologie des formes politiques et sociales
1/ Classement et analyse des divers régimes
Il définit des critères de classement des régimes politiques traditionnel :
- Critère quantitatif, par rapport au nombre des gouvernements : monarchie, gouvernement d’un seul ; oligarchie, gouvernement de plusieurs ; démocratie, régime où le commandement appartient à tous les citoyens.
- Critère économique et social, il recherche quelle est la classe dominante dans la société. Il ne s’agit pas de savoir quelle est la classe la plus nombreuse, mais celle qui gouverne.
- Autre critère : il s’agit de savoir dans quel intérêt gouvernent les gouvernants : l’intérêt général
(Qu’Aristote appelle le bien commun) ou leur intérêt particulier : par intérêts particuliers
Il y a pour Aristote une vingtaine de formes de gouvernement dont certaines lui paraissent bonnes et d’autres mauvaises. Le critère déterminant est constitué par la poursuite du bien commun.
Règle sociologique majeure d’Aristote : un bon gouvernement se confond avec le gouvernement de la classe moyenne.
2/ La valeur des différents régimes politiques
Il ne pense pas qu’il y ait un seul bon régime politique. Il est partisan d'une théorie des climats et l’idée d’une relativité des régimes politiques en fonction de considérations de lieu, idées qui seront reprises par Bodin puis Montesquieu.
Le pire des régimes est la tyrannie La plus mauvaise démocratie est celle où le pouvoir suprême est exercé au jour le jour et capricieusement par la masse. Ce type de démocratie, apparu historiquement le dernier dans l’Athènes du Ve et du IVe siècle, est sévèrement jugé par Aristote autant que par Platon.
Pour Aristote le meilleur des régimes politiques est le régime du juste milieu, tant sur le plan social que politique. En matière sociale, la politiéia est le gouvernement de la classe moyenne. En matière politique, elle est en pratique une synthèse de démocratie et d’oligarchie. La valeur politique essentielle est la modération du gouvernement Aristote est l’inspirateur de toutes les sciences politiques jusqu’à nos jours. Et plus généralement, il est l’un des fondateurs de la pensée sociologique.
Section II : la pensée sociologique de l'époque romaine jusqu'à la fin du Moyen Age
1/ Rome et la pensée sociologique
La pensée sociologique et la philosophie politique grecque ont été introduit à Rome par Polybe, historien et philosophe grec (-205 ; -125). Il reprend la conception cyclique de Platon : au début la monarchie s'instaure au profit du plus fort et cumule tous les pouvoirs. Ce régime conduit à l'abus, dégénère en tyrannie. Les citoyens chassent le tyran pour instaurer l’aristocratie, qui tourne en oligarchie. Elle est à son tour renversée par le peuple, qui instauré la démocratie qui se transforme en démagogie. Défilent donc trois régimes et leurs formes perverses.
À Rome Polybe analyse le processus exceptionnel dû à la supériorité du régime constitutionnel, mélange des trois régimes de base : monarchie, aristocratie, démocratie, mais aussi sur le niveau moral de toutes les classes sociales.
Or milieu 2è siècle avant JC une crise économique et sociale s'ouvre, qui après un siècle de guerres civiles fait passer Rome de la République à l'Empire.
A l'époque romaine importance également de la sociologie descriptive : les conquêtes ont permis aux romains d'étudier les usages et les institutions de peuples variés, cf. Commentaires de Jules César sur les Gaulois ou Tacite. Va connaître une évolution importante avec le christianisme.
2/ Le christianisme et ses implications sociologiques
A/ le caractère novateur du christianisme en matière politique et sociale
Rupture avec le monde antique car la religion est extérieure à l'E et indépendante, ce qui voit naître la dualité du pouvoir spirituel et pouvoir temporel : l'E n'est plus le créateur de la religion et de la morale.
Promesse de compensation céleste et d'égalité des âmes devant dieu. : n'implique pas l'abolition de toutes les barrières sociales mais montre que la foi chrétienne se veut universaliste et individualiste.
B/ Saint Augustin
350 ; 430, il est évêque d'Hippone (actuelle Tunisie). En 410 Alaric s'empare de Rome, ce qui est interprété par les païens comme une punition pour avoir oublié les anciens dieux. Saint Augustin réfute ce point de vue dans "La cité de Dieu".
Décrit une antithèse entre la cité terrestre et la cité céleste, qui sont les deux tendances des êtres humains. Tous les E doivent s'inspirer au maximum des idéaux divins. Saint Augustin est fidèle au régime impérial, n'a pas de préférence quant aux formes de gouvernement, pense que la constitution politique de chaque peuple dépend de ses conditions de vie et de son degré d'évolution, relativisme dans la ligne d'Aristote. Comme chez Saint Paul, tout pouvoir vient de dieu.
3/ La pensée sociologique du Moyen-Age
A/ La sociologie descriptive et comparative Deux voyageurs majeurs :
- Marco Polo (1254-1323) : a voyagé jusqu'en Chine et Sumatra, décrit dans "Le livre des merveilles" des informations sur les sociétés d'Extrême-Orient.
- Ibn Batouta (1304-1378) : né au Maroc, a voyagé à travers tout le monde musulman jusqu'à la Russie, l'Inde, le Soudan. Le récit de ses voyages est une mine de renseignements sociologiques.
B/ Saint Thomas d'Aquin
Né en 1225, aristocratie italienne, enseigne la théologie à Paris, Bologne, Rome. Le plus célèbre penseur du MA occidental.
Dans la "Somme théologique" Saint Thomas d'Aquin considère comme Aristote que l'homme est animal social qui évolue dans une société politique, dont le cadre peut être plus ou moins large, dans la recherche de l'intérêt commun. La société n'existe pas pour elle-même, l'E est seulement une association pour bien vivre.
Contrairement à Aristote, il considère que l'individu trouve sa réalisation intégrale dans la cité terrestre car l'E est incapable de conduire les hommes à leur fin spirituelle (rôle de l'Eglise). Le titulaire du pouvoir résulte d'une intervention humaine qui peut prendre des formes variées, mais schématiquement : soit la communauté a consenti, soit elle n'a pas choisi mais obéit au titulaire en raison de ses vertus. Comme Aristote, préférence pour les régimes mixtes (la politéia). Il est favorable à la monarchie car elle évite les dissensions au sein des E.
C/ Ibn Khaldoun
Né à Tunis en 1332 (1406). Aux services de divers princes musulmans d'Afrique du Nord et du sud de l'Espagne. Assiste à la décadence du monde arabo-musulman : disparition des derniers E islamiques d'Espagne, anarchie politique en Afrique du Nord, invasion des Tartares au Moyen-Orient.
Pose la question de l'explication des déclins. Il désigne une science : "science de la société tout entière". Pour lui la vie sociale est un phénomène naturel, mais comme Aristote il reprend la théorie du climat qui influence cette vie. Le pouvoir des hommes est indépendant de la religion, c'est une conséquence naturelle de la sociabilité sans quoi régneraient le désordre et l'anarchie.
Son concept sociologique majeur est celui d'esprit de corps d'un groupe humain, cad la solidarité. L'autorité n'est ainsi fondée que sur la force d'un groupe qui s'en empare grâce à la cohésion.
Cette forme d'énergie est présente chez les nomades mais se perd dans le milieu urbain, même si la ville représente pour lui la civilisation. Les nomades, en s'emparant des villes et en imposant de nouveau le pouvoir et cette énergie, régénèrent ces villes.
C'est donc également une théorie cyclique de l'histoire politique influencée par Platon, fondée sur les rapports dialectiques entre le nomadisme et la civilisation : toute domination d'une dynastie ou d'un groupe ne dure en général que 3 générations.
Cependant la supériorité conquérante des peuples nomades s'achève avec l'invention de l'arme à feu à la Renaissance.
Section III/ La sociologie de la Renaissance aux Lumières
1/ La pensée sociologique au XVIe siècle
A/ Machiavel
Célèbre philosophe politique florentin, Nicolas Machiavel (1469-1527) est un haut fonctionnaire de la République. Il est chassé de son emploi et banni. Il écrit deux œuvres politiques majeures : "Le prince" et "Les discours sur la première décade de Tite Live". Il est théoricien de l’action politique, qu’il envisage dans un cadre bien précis : celui de l’Etat national, dans lequel étudie deux hypothèses : une situation de légitimité normale et la création d’un Etat.
A/ Une situation de légitimité normale
Machiavel raisonne alors sur la République romaine d’avant les guerres civiles. Il s’interroge sur les raisons de sa cohésion et de son civisme exceptionnel qui lui ont permis de triompher de la guerre contre Carthage pense que le civisme n’était pas dû à une exceptionnelle pureté de mœurs, mais au sage agencement des institutions politique romaines en un régime mixte
Il considère que globalement, le pouvoir populaire et le pouvoir aristocratique se limitent mutuellement, cependant, il observe que si les régimes mixtes ou modérés reposent sur des contre poids, l’équilibre n’est pas garanti définitivement. D’où l’intérêt d’interventions politiques intelligentes.
B/ Le cas de la création d’un nouvel Etat
Dans Le Prince (en patriote italien sincère) il recherche les conditions qui permettraient la création en Italie d’un Etat national. L’idée de Machiavel est que pour le prince, il est beaucoup plus efficace de se faire craindre que de se faire aimer, mais pour autant, il ne doit pas se faire haïr. Cela signifie que le prince a tout intérêt à ne pas troubler la « société civile », à ne pas intervenir dans la sphère privée des activités domestiques et économiques.
Donc le prince de Machiavel n’est pas un tyran, il n’est pas non plus un chef totalitaire. Cela n’empêche pas que le prince puisse avoir recours au mensonge pour être efficace et à l’hypocrisie. Il doit se servir de la religion (sans pour autant s’estimer lié par ses commandements).
Il insiste sur le rôle de la force, laquelle est un mélange de violence et de ruse. Il détache donc la politique de la théologie, de l’éthique et de la philosophie. Aussi le prince est-il « libéré » de la morale commune.
B/ Jean Bodin
Juriste angevin (1530-1596), auteur de "Les six livres de la République" (1576), ouvrage écrit au moment des guerres de religions, terrible guerre civile qui ravage la France durant la seconde moitié du XVIe siècle.
Insiste sur la notion de souveraineté qui constitue pour lui l’essence même de la République, à la fois perpétuelle et absolue, ce qui signifie qu’il ne peut y avoir, à côté du pouvoir souverain, de pouvoir supérieur ou même égal. De même cette souveraineté ne se partage pas, elle est indivisible.
Bodin établit aussi une classification des formes d’Etats mais va introduire une distinction capitale entre Etat et gouvernement (entre le souverain et les magistrats). Il montre que chaque forme d’Etat peut avoir plusieurs formes de gouvernements.
On retrouve chez Bodin la théorie des climats, marque bien qu’il n’y a pas de politique indépendante des conditions géographiques et historiques. C’est une vision sociologique qui sera reprise par Montesquieu.
2/ Montesquieu
Magistrat et aristocrate bordelais (1689-1755), président du parlement de Bordeaux Il part de la complexité du réel et de son extrême variété en matière de mœurs, de coutumes, d’idées, de lois, d’institutions Il s’efforce de découvrir un ordre intelligible par la recherche de lois naturelles, d'explications à caractère scientifique. De la même façon, Newton a trouvé derrière le fatras apparent du système planétaire, une explication scientifique : la gravitation universelle. A élaboré à la fois une sociologie politique et une sociologie générale.
A/ Une sociologie politique
Montesquieu s’est inspiré de la politique d’Aristote pour sa typologie et son analyse des formes de gouvernement, et a beaucoup innové par rapport à lui.
A/ La typologie des régimes politiques
Pour Montesquieu, les formes de gouvernement peuvent se ramener à 3 grands types :
République, monarchie, despotisme. Pour lui aristocratie et démocratie ne sont que deux variantes de gouvernement républicain
L’originalité de Montesquieu vient surtout de ce qu’il double sa classification d’une recherche du principe psychologique nécessaire au bon fonctionnement de chaque forme politique.
Le principe de la république est la vertu ; le principe de la monarchie est l’honneur ; quant au principe du gouvernement despotique, c’est tout simplement la peur.
Il cherche également à établir un rapport entre les dimensions d’un Etat et sa forme de gouvernement. Il est de la nature de la république d’avoir un petit territoire, sinon elle ne pourra pas subsister.
Pour sa classification et son analyse, Montesquieu précise les modèles historiques auxquels il se réfère : modèle de la république : les cités antiques ; en ce qui concerne la monarchie, les monarchies française et anglaise de son temps ; quant au despotisme, les grand empires asiatiques (empire perse, chinois, empire des Indes, empire japonais).
B/ La théorie du gouvernement modéré
En s’appuyant sur l’exemple de la Constitution anglaise, Montesquieu montre que tout gouvernement modéré repose sur le fait que le pouvoir arrête le pouvoir. C’est la vieille idée du régime mixte, réalisé au moyen de contre-forces. Montesquieu développe la théorie d’une distribution des pouvoirs Le monarque détient le pouvoir exécutif, quant au législatif, il est incarné par deux assemblées : la chambre des Lords (noblesse), la chambre des Communes (le peuple). Il y a bien aussi la puissance de juger, mais pour Montesquieu, son rôle n’est que d’appliquer les lois.
Donc Montesquieu pose le principe selon lequel la condition du respect des lois et de la sécurité des citoyens n’est qu’aucun pouvoir ne soit illimité.
B/ Une sociologie générale
Elle comporte trois aspects principaux.
A/ Une recherche des causalités particulières des phénomènes sociaux et politiques
Il réalise une étude méthodique des conditions qui déterminent un groupe social donné. Il commence par l’influence du milieu géographique qu’il subdivise en deux : le climat, la nature du terrain. Il étudie aussi la situation démographique. Il envisage en outre les conditions économiques, le régime de la propriété, le commerce, les communications, la monnaie...). Il s’attache également aux croyances (religieuses et autres).
Ses explications sont limitées (par ex le mauvais climat en Angleterre influencerait l'humeur des Anglais et leur incapacité à mettre en place le pouvoir d'un seul), cependant ces critiques n’enlèvent rien à l’intérêt de la méthode sociologique de Montesquieu, d’autant qu’il trouve le moyen de dépasser la sociologie analytique et de réaliser une synthèse.
B/ Une conception synthétique de la société
C’est ce que Montesquieu appelle « l’esprit général » d’une nation et qui résulte de l’ensemble des causes physiques, sociales et morales. L’« esprit général » correspond à un certain style de vie et des relations en commun.
C/ Une référence aux lois universelles de la raison
Montesquieu croit à des rapports d’équité à des principes de justice antérieurs aux lois positives et universellement valables. C’est au nom de ces principes de justice que Montesquieu condamne l’esclavage et le despotisme. Or s’il y avait déterminisme absolu entre climat chaud et l’esclavage (entre un immense Etat et le despotisme), il deviendrait impossible de porter une condamnation morale contre des institutions fatales, inévitables.
Dès lors que la condamnation existe, cela signifie que le déterminisme de Montesquieu est relatif. Il n’y a pas de nécessité causale, mais une simple relation d’influence.
3/Les autres représentants de la pensée sociologique au XVIIIe siècle
A/ Les économistes
Ecole de pensée économique créée par le docteur Quesnay : la physiocratie (textuellement le gouvernement de la nature), dont la pensée sociologique est attachée à l’économie. Les physiocrates considèrent qu’il existe un certain nombre de lois naturelles qui régissent la vie matérielle des sociétés, si bien que le rôle du gouvernement est avant tout de ne pas entraver le libre jeu des mécanismes économiques spontanés.
Les physiocrates attendent du gouvernement l’abolition des réglementations économiques et commerciales de l’Ancien Régime. Le programme de la physiocratie est la liberté économique intégrale. Il faut rapprocher de la physiocratie la pensée du philosophe et économiste anglais Adam Smith (1723-1790), un des plus célèbres théoriciens du libéralisme économique. Smith est en même temps psychologue et moraliste, il construit une théorie sociologique montrant qu’en vertu d’une loi de la nature l’activité égoïste des hommes profite à la société tout entière.
B/Condorcet et les théoriciens de l’idée de progrès
Condorcet (1743-1794) est l’auteur du Tableau historique des progrès de l’esprit humain en pleine Révolution, dont Condorcet sera l’une des victimes. Il dégage une loi naturelle : celle du progrès de l’espèce humaine (grâce à l’accumulation de connaissances scientifiques et de leurs applications projette dans l’avenir la courbe progressive du passé (prospective). Pour lui, le progrès est irréversible et durera autant que l’espèce humaine.
Ce progrès doit entraîner selon lui l’affaiblissement des inégalités entre les nations, entre les êtres, entre les sexes. On retrouvera cette idée de progrès chez un autre penseur français, inventeur du terme de « sociologie » (1839), Auguste Comte.
Chapitre II/ La sociologie depuis le début du XIXe siècle
Section I/ L’essor de la sociologie au cours du XIXe siècle
1/ Les progrès de la sociologie empirique et quantitative
Volonté d’acquérir des connaissances scientifiques du social qui caractérise le XIXe siècle. 3 sociologues majeurs :
• Quételet (mathématicien et statisticien belge 1796-1874) a étudié sur le mode mathématique et statistique les phénomènes de natalité, de mortalité, de nuptialité, de criminalité, de suicide. Physique sociale et en tire la conclusion quels faits sociaux sont soumis (comme les faits d’ordre physique) à des lois rigoureuses.
• Plus descriptif, Villermé (1782-1863) est un médecin français ayant réalisé une grande enquête sur les conditions de la vie ouvrière (chez les ouvriers textile) aux environs de 1830. Développe des instruments de connaissance sociologique très riche (qui inclut la dimension psychologique et affective au milieu social étudié). De même, Engels fera paraître son Rapport sur la situation de la classe laborieuse en Angleterre (1844).
• Le Play (penseur réformateur social) polytechnicien, consacre de nombreuses années (aidé de quelques chercheurs) à l’étude sociologique des familles ouvrières au milieu du XIXe siècle. Il pénètre dans toutes les parties de l’habitation, c'est un des pionniers de l’enquête sociale. Pour lui, la sociologie, science des phénomènes collectifs, est en premier lieu vue comme un moyen de diagnostiquer et de soigner un certain nombre de pathologies et d’améliorer le fonctionnement de certains organes de la société.
2/ Auguste Comte
(1798-1857). Comte est lui aussi un polytechnicien, salué comme le fondateur de la sociologie. Pour Comte, la sociologie est à la fois la science de l’humanité, la reine des sciences et le fondement d’une religion de l’humanité
A/ La sociologie, science de l’humanité
Pour Comte, la sociologie est une science ayant pour objet l’étude de l’être social dans son ensemble Les générations sont reliées entre elles par l’accumulation d’une expérience, d’un savoir et d’œuvres matérielles. À travers le temps, l’esprit humain a obéi à une loi de progrès, la loi des trois états :
1/l’état théologique : état de l’esprit humain où il explique les phénomènes en les attribuant à des êtres de nature divine, socialement caractérisé par la prééminence des prêtres et des militaires ;
2/ l’état métaphysique, stade de l’esprit humain qui explique les phénomènes par des causes plus abstraites (comme la nature).
3/ l’état positif (ou positiviste) où l’esprit humain abandonne la recherche causale (la recherche du pourquoi) qui est métaphysique, et se contente d’observer scientifiquement les phénomènes et de rechercher les lois qui les régissent. La société valorise alors les hommes de science et renonce à la guerre (exploitation rationnelle des ressources naturelles). C’est la société qu’Auguste Comte appelle la société industrielle (dont il est aussi l’inventeur du terme).
L'essentiel est que pour Comte, la loi des trois états est destinée à s’appliquer à l’humanité entière. Il suppose donc qu’il n’y a qu’une façon de penser valable pour tous les hommes.
B/ La sociologie, reine des sciences
Pour lui, les sciences sont au nombre de 6 classées par ordre de complexité croissante :
Mathématique, astronomies, physique, chimie, biologie et enfin couronnant le tout, la science nouvelle : la sociologie.
La sociologie de Comte débouche sur une organisation rationnelle de la société. Sur un ordre social nouveau fondé sur un savoir scientifique (tout comme l’ordre social ancien fondé sur des idées théologiques)
Comte est conscient qu’il ne peut pas y avoir d’ordre social sans consensus social (lequel est traditionnellement apporté par la religion), d’où son idée de la nécessité d’un pouvoir spirituel qui va d’ailleurs déboucher sur une nouvelle religion.
C/ De la sociologie à la religion de l’humanité
Comte est persuadé, avec la doctrine positiviste, de détenir la solution du problème social (tel qu’il se pose au XIXe siècle). Il est hostile à la fois à la politique et à la violence.
Pour lui il n’y a pas de consensus sans la fusion du savoir et du sentiment. D’où une religion destinée à combattre l’individualisme, ce que Comte appelle « la maladie occidentale » et à prôner « l’insurrection de l’individu humain contre l’espèce humaine ». Mais cette religion est fondée sur le positivisme, religion que Comte appelle « le grand Être », non pas l’humanité telle qu’elle est
3/ La sociologie de Marx
Karl Marx (1818-1883), a réalisé deux activités principales : une activité de théoricien qui l’a conduit à réaliser une œuvre énorme combinant philosophie, histoire, sociologie, économie, et une activité de militant révolutionnaire. Sociologue d’un type particulier : sociologue économiste.
A/ Marx et l’analyse socio-économique du capitalisme
Frappé par l’opposition entre les sociétés du passé (féodales, militaires, théologiques) et les sociétés modernes (industrielles et scientifiques) qui se développent en Europe au XIXe siècle.
Mais tandis que pour le positivisme, les conflits entre ouvriers et entrepreneurs ne sont que des imperfections de la société industrielle (donc relativement faciles à corriger), ils constituent au contraire pour Marx le fait majeur des sociétés modernes et en même temps le moteur de l’histoire. Pour lui le régime capitaliste est caractérisé avant tout par ses contradictions.
A/ Le Manifeste communiste
Brochure de propagande publiée en allemand à Londres en 1848 Le thème central est constitué par la lutte des classes.
Selon les époques, c’est la lutte de l’homme libre et de l’esclave, du patricien et du plébéien, du baron et du cerf, du maître artisan et du compagnon, et pour finir du prolétaire et du bourgeois. La bourgeoise (ce mot pour Marx désigne la classe capitaliste) a été la classe porteuse de révolution dans la société féodale en dissolution, d’où la mise en place du régime capitaliste.
Mais ce faisant, la bourgeoisie bouleverse constamment les « instruments » et les « rapports de production » et donc « l’ensemble des conditions sociales ». Il en résulte, selon Marx, deux contradictions majeures :
1/ contradiction entre les forces et les rapports de production.
2/ contradiction entre la progression des richesses créées par la société et la misère croissante du plus grand nombre. Marx annonce que de cette contradiction naîtra tôt ou tard une crise révolutionnaire qui détruira le régime capitaliste et va instituer à la place « une association où le libre épanouissement de chacun est la condition du libre épanouissement de tous ».
B/ Contribution à la critique de l’économie politique
Ouvrage publié à Berlin en 1859 dans lequel Marx développe sa théorie générale de la société (que l’on appelle aussi le « matérialisme historique ») :
- 1ère idée : la compréhension des processus historiques repose sur l’analyse des rapports sociaux
- La 2e idée est que dans toute société, on peut distinguer l’infrastructure et la superstructure - La 3e idée est que le moteur de l’histoire est la contradiction intervenant à certains moments entre les forces productives et les rapports de production
- La 4e idée est que les révolutions sont expression d’une nécessité historique en cas de contradiction entre forces et rapports de production.
Il distingue les grandes étapes de l’histoire humaine en fondant chacune d’elles sur un certain mode de production. Chaque époque historique est caractérisée par un mode de production économique dont résultent nécessairement une certaine structure sociale, certaines idées, certains sentiments, certains régimes politiques
C/ Le Capital
Il affirme qu’un régime économique ne peut pas être compris en faisant abstraction des structures sociales, d’où sa tentative de construire une théorie à la fois économique et sociologique expliquant à la fois le mode de fonctionnement et la disparition inévitable du capitalisme.
Repose sur l’affirmation que le capitaliste achète la force de travail du salarié le prix qu’elle vaut, mais que le temps de travail nécessaire au salarié pour produire une valeur égale à celle de son salaire est inférieure à la durée effective du travail. Cela crée donc une valeur supplémentaire que Marx appelle la plus-value et qui ne profite qu’à l’entrepreneur.
B/ Les équivoques de la pensée de Marx
- La 1ère vient du fait que Marx a beaucoup écrit et qu’il n’est pas du tout certain qu’il ait une pensée unique (classique chez les auteurs très prolifiques). La 2e vient de la philosophie qui sous-tend son œuvre sociologique et économique
- Aux yeux de Marx, dans la société de son temps, l’homme est comme dépossédé de son être, si bien que le jugement qu’il porte sur la société du XIXe siècle est au départ un jugement passionnel et moral
- La 3e équivoque est d’ordre économique. La théorie de la plus-value n’est pas convaincante car sa conséquence devrait être que, dans une entreprise, il y ait plus de profits quand il y a une grande masse de salariés et peu de mécanisation, alors qu’en réalité c’est l’inverse qui se produit.
- Enfin, la 4e et dernière équivoque se situe dans le domaine historique et sociologique.
On relève notamment que la distinction entre superstructure et infrastructure n’est guère satisfaisante car les deux choses sont trop liées. Le savoir scientifique fait a priori partie de la superstructure, mais comme il conditionne l’appareillage technique, on peut dire qu’il fait partie de l’infrastructure.
4/ Tocqueville
1805-1859, issu de l'aristocratie normande, envoyé par le ministère de l'intérieur en mission aux EU pour étudier le régime parlementaire américain. Ministre des affaires étrangères sous la 2ème république. Donne la primauté, contrairement à Compte ou Marx, non pas au fait industriel ou capitaliste mais au fait démocratique. Constate que les sociétés peuvent être soit libérales, soit despotiques. Sociologue comparatiste qui ne met pas l'accent sur les phénomènes de structure mais sur le problème de compatibilité entre démocratie et liberté.
A/ Démocratie et liberté selon Tocqueville
La démocratie selon Tocqueville est prise au sens large : égalisation des conditions, plus de distinctions des ordres et des classes, individus socialement égaux, cad pas de différence héréditaire, tous les honneurs sont accessibles à tous. Donc l'idée de la démocratie implique à la fois l'égalité sociale et la tendance à l'uniformisation des genres et es niveaux de vie, ce qui appelle sur le plan politique à un gouvernement démocratique.
La question pour Tocqueville est de savoir s'il est possible qu'une société démocratique ne sombre pas dans le despotisme.
B/ La réponse américaine
Dans "De la démocratie en Amérique", il expose en quoi selon lui la société américaine est à la fois démocratique et libérale, s'explique par les lois, les mœurs et les croyances.
A/ Les lois
Les EU tiendraient un bénéfice du caractère fédéral de leur constitution car permet de combiner les avantages des grands et des petits E, une diversité de législations adaptées aux circonstances du milieu avec un E fédéral qui permet la libre circulation des biens, des personnes et des capitaux.
De plus avantage avec le bicaméralisme qui préserve de la concentration des pouvoirs dans l'organe législatif tout en assurant la pluralité des partis.
Enfin avantage avec liberté de la presse et liberté d'association.
B/ les mœurs et les croyances
Mais la grande explication de la liberté aux EU selon Tocqueville réside dans les mentalités qui combinent esprit de religion et esprit démocratique, cf. fondateurs de la Nouvelle Angleterre qui étaient à la fois religieux et politiques novateurs.
Pour Tocqueville une société égalitaire a besoin d'une discipline morale inscrite dans la conscience des individus, mécanisme qui assure la liberté au sein de la démocratie américaine, envers laquelle il reste toutefois critique.
C/ Tocqueville et le drame politique français
"L'Ancien régime et la révolution" : pour Tocqueville la facilité avec laquelle la Révolution a détruit l'ancienne société aristocratique s'explique par le fait que la centralisation administrative de la royauté avait vidé de leurs substances l'essentiel des vieilles institutions et des anciennes structures sociales. Cad qu'en même temps que la royauté avait tendu à faire de la société française la société la plus "égalitaire et démocratique" d'Europe les institutions politiques et sociales étaient restées en place, d'où que la Révolution, pour Tocqueville, s'explique par des causes essentiellement politiques et a repris la centralisation politique et administrative de l'AR.
D/ Les grandes tendances sociologiques des sociétés démocratiques
Pour Tocqueville la plus dangereuse tendance est l'égalitarisme, cad l'égalité poussée à l'extrême, qui provoque l'asservissement au nom de l'égalité totale.
Mais il y a aussi l'individualisme, à la fois intellectuel : l'homme cherche en lui-même ses croyances et non pas dans la tradition ; sentimental : l'homme tend à s'isoler des autres. Sources possibles d'anarchie, de despotisme.
Les remèdes de Tocqueville sont la vie associative et les libertés locales.
Finalement, appartient à la lignée de Montesquieu, s'oppose à Comte ou Marx par le refus de vastes synthèses visant à prévoir l'histoire.
5/ Spencer
Sociologue anglais (1820-1903), ouvrage principal "Traité de philosophie", auteur des théories de l'organicisme et de l'évolutionnisme, pensée sociologique marquée par la prudence et le relativisme.
A/ l'organicisme de Spencer
Considère la société comme un "organisme social", développe un parallèle entre les fonctions sociales et les organismes biologiques (fonctionnalisme). Chacun des deux types d'organismes à 3 systèmes d'organes : nutrition, distribution et régulation. Estime que la vie sociale est le but de tout individu.
B/ évolutionnisme de Spencer
Sa sociologie est dominée par l'idée d'évolution, vient du naturaliste français Lamarck. Cette théorie va influencer Darwin.
Reprend la théorie transformiste de Lamarck selon laquelle les espèces tendent à devenir plus complexes et à mieux s'adapter à l'environnement et la transpose à la sociologie : la société se transforme de façon lente depuis le simple vers le complique, les sociétés sont également soumises à la loi générale de l'évolution.
A/ le passage des sociétés simples aux sociétés complexes
Entreprend de démontrer que les groupes humains ont commencé par de petites collectivités simples dont tous les membres étaient au même niveau, en résulte une typologie des sociétés en 4 types :
- Les sociétés simples
- Les sociétés composées (clans, niveau intermédiaire d'autorité)
- Les sociétés doublement composées (dédoublement des autorités et sédentarisation)
- Triplement composées (grandes civilisations)
B/ l'antithèse entre société militaire et société industrielle
Pour Spencer la société militaire, la plus ancienne, est caractérisée par la guerre qui est une activité nécessaire et permanente, où la religion a un caractère autoritaire et où le travail est marqué la "coopération obligatoire".
La société industrielle a quant à elle deux caractères : la liberté et l'autonomie des personnes. Se traduit par des institutions plus démocratiques, un individualisme religieux croissant et pas de contrainte mais des contrats, "coopération volontaire".
C/ La prudence et le relativisme de la sociologie de Spencer
Ses théories ne correspondent pas à un déterminisme strict car l'évolution dépend de nombreuses conditions et d'une infinité de relations de causalité entre les individus et le système d'où ils viennent. Estime que les lois de la sociologie sont seulement tendancielles, d'où que la loi de l'évolution ou la typologie bipolaire ne sont que de simples modèles.
Section II/ "La génération du tournant du siècle"
3 grands sociologues : Durkheim, Pareto et Weber. Le thème fondamental de leur réflexion est les rapports entre la religion et la science. Ils ont le sentiment très fort que la religion traditionnelle est en voie d’épuisement, d’érosion sous l’effet des progrès de la science et pensent que la société ne peut garder sa cohérence qu’au moyen d’une foi commune.
Durkheim plaide pour la création d’une morale inspirée par l’esprit scientifique. Pareto insiste sur le fait que les sentiments qui assurent le consensus social sont scientifiquement faux mais socialement efficaces. Weber garde la nostalgie de la foi du passé.
1/ Durkheim
(1858-1917) (fondateur de l’école sociologique française) professeur de philosophie de l’Université française hériter intellectuel d’Auguste Comte comme lui par la recherche des moyens du consensus social
A/ De la division du travail social
Ouvrage paru en 1893. Interrogation de Durkheim : comment les individus sont-ils intégrés à la société ? Il existe selon lui deux grandes formes de solidarité.
A/ Les deux formes de solidarité chez Durkheim
- Une solidarité mécanique à savoir la solidarité de la ressemblance entre les individus, caractérise les sociétés archaïques et plus généralement les sociétés traditionnelles
- La solidarité organique qui correspond à une société où le consensus résulte de la différenciation entre les individus. Analogie avec l’organisme vivant où chaque organe remplit une fonction propre. Caractérise les sociétés modernes, résultat d’un processus historique de division du travail, un processus évolutif cf. Spencer.
B/ Le concept de « conscience collective »
« L’ensemble des croyances et des sentiments communs à la moyenne des membres d’une société ». Pour Durkheim, historiquement, il y a d’abord les sociétés où les individus paraissent interchangeables et fondus dans le tout social. Ce sont les sociétés collectivistes qui sont historiquement les premières. Il en tire l’idée qu’on ne peut pas expliquer le phénomène de différenciation sociale et de solidarité organique en partant de l’individu puisque l’individu conscient de sa différence n’existait pas. D’où, pour Durkheim, la nécessité d’expliquer les phénomènes individuels par l’état de la société.
C/ Durkheim et le droit
Il distingue deux formes de droit :
- Le droit répressif qui sanctionne les fautes et les crimes
- Le droit restitutif qui vise à remettre les choses en l’état quand une faute a été commise.
Il souligne que le droit répressif est révélateur de la conscience collective. Dans les sociétés modernes, à solidarité organique, la part faite au droit répressif diminue au profit du droit restitutif.
D/ La cause du processus de division du travail social
Durkheim est à la recherche d’une seule cause, tout phénomène social peut être expliqué par un autre phénomène social. Il prétend expliquer le processus de division du travail social par une augmentation du volume et de la densité des hommes.
Il entend ce mot de « densité » de 2 manières :
- La densité matérielle, soit l’augmentation du nombre des individus sur une surface donnée
- La densité morale, soit l’intensité des communications et des échanges entre les individus.
Il invoque la théorie de Darwin de la lutte pour la vie : l’augmentation du nombre et de la densité des hommes provoque une intensification de la lutte pour la vie et la différenciation sociale constitue la solution pacifique à cette lutte plus intense. La différenciation sociale remplace la compétition par la complémentarité.
Ainsi Durkheim est très favorable à la division du travail social. Cependant, il ne se dissimule pas que les progrès constants de l’individualisme aient un effet dissolvant sur la solidarité elle-même et donc des conséquences pathologiques pour la société
B/ Le suicide
Il étudie l’un des aspects pathologiques des sociétés modernes, thème que Durkheim a choisi précisément parce qu’il semble spécifiquement individuel. Essaye de montrer à quel point les individus sont déterminés par la réalité collective, pense qu’ils se tuent sous l’effet d’une force sociale et récuse l’idée d’un suicide par imitation.
La typologie des suicides le conduit à distinguer :
1/le suicide égoïste
2/ Le suicide altruiste (soit un suicide héroïque
3/ le suicide anomique : il observe en effet une poussée des taux de suicide à la fois dans des périodes de difficultés économiques et dans les périodes de grande prospérité. Il relie cela à l’« anomie », soit l’absence ou la désintégration des normes qu’il observe dans les sociétés modernes
C’est sur le suicide anomique que Durkheim construit sa théorie du suicide : pour Durkheim, l’augmentation du taux de suicide qui caractérise la société de son temps est la conséquence d’une véritable maladie de la société.
Il se demande donc comment restaurer l’intégration de l’individu à la collectivité. Il ne compte pour cela ni sur l’Etat, ni sur la famille, ni sur la religion. Il place ses espoirs dans l’action intégratrice d’organisations professionnelles, les corporations.
C/ Les formes élémentaires de la vie religieuse a/ Le totémisme australien
L’idée qui fonde la démarche de Durkheim est que l’on peut saisir l’essence d’un phénomène social en observant les formes les plus élémentaires de celui-ci.
Il choisit une religion primitive, le totémisme des tribus d’Australie en décidant que c’est la forme religieuse la plus simple. Durkheim analyse cette religion en utilisant les notions de clan et de totem. Le clan est le groupement humain le plus simple (groupement de parenté) qui exprime son identité en se rattachant à une plante ou un animal (qui constitue le totem) ; il en déduit que ce qui constitue l’essence de la religion est la division bipartite du monde entre ce qui est sacré et ce qui est profane
B/ Religion et société selon Durkheim
Il s’agit d’expliquer pourquoi les sociétés sont conduites à concevoir cette force anonyme et diffuse. Sa réponse est que c’est la seule force réelle qui dépasse les individus (en prenant pour eux la forme d’une force anonyme et diffuse) : la société elle-même. Il en conclue que seule la société est une réalité sacrée Si bien que les hommes dans leurs religions, adorent leur société sans s’en rendre compte les sociétés ont une aptitude à sécréter des religions quand elles se trouvent dans un état d’exaltation collective qui fait sortir chacun de lui-même et le fait de participer à la force du groupe.
Avec sa conception Durkheim a l’ambition de sauver la notion de religion (tout en condamnant, au nom de la science, le contenu intellectuel des religions traditionnelles).
Pour conclure sur la sociologie de Durkheim, on note que la critique majeure qu’elle a suscitée résulte de sa tendance à concevoir la société comme une entité indifférenciée. La sociologie de Durkheim souffre du fait qu’elle refuse à l’individu le statut de sujet agissant. Il y a donc un grand absent dans la sociologie de Durkheim : l’individu en tant qu’acteur social.
2/ Pareto Vilfredo Pareto
(1848-1923) occupe la chaire d’économie politique de l’université de Lausanne. En 1916, il publie (à Florence) son Traité de sociologie générale. La sociologie de Pareto est fondée sur la mise en évidence du caractère non-logique de la majorité des actions humaines.
A/ Le caractère non-logique de la majorité des actions humaines
Le point de départ de Pareto est la distinction qu’il établit entre actions logiques et actions non-logiques.
- L’action logique est caractérisée par une adéquation à la fois subjective et objective entre les moyens employés et le résultat poursuivi.
- « Non-logiques » (non rationnelles) parmi lesquelles, il effectue une classification :
1/ l’action non-logique du 1ergenre est représentée par des actions dépourvues de finalité, à la fois subjectivement et objectivement
2/ L’action non-logique du 2e genre est une action pas réellement reliée à un résultat objectif, mais perçue par le sujet comme devant provoquer le résultat souhaité
3/ L’action non-logique du 3e genre est une action comportant un résultat objectif
4/ L’action non-logique du 4e genre est une action produisant un résultat objectif, mais ce résultat est différent de celui consciemment recherché par le sujet agissant
Pour Pareto rien de ce qui dépasse l’expérience n’a de place dans la science. Or, puisque le réel est trop complexe pour que l’homme ne puisse jamais retrouver la réalité dans toute sa complexité, la science est par définition inachevée, incapable de fournir à l’homme l’équivalent de ce qui appartient à la religion (conception totalement différente de celle de Durkheim). Donc, les actions logiques ne peuvent couvrir dans le meilleur des cas qu’une partie de la conduite humaine. La majorité des actions humaines sera nécessairement non-logique.
B/ Pareto et l’étude des actions non-logiques
Les sentiments et l’état psychique des hommes ne sont pas connus du sociologue de manière directe. Il peut seulement en retrouver des expressions et Pareto décide d’appeler « résidus » la manifestation commune à de nombreux hommes d’un certain sentiment, et de donner le nom de « dérivations » aux théories par lesquelles les hommes vont justifier intellectuellement l’attitude commandée par le sentiment.
A/ Typologie des « résidus »
Pareto dénombre 6 classes de « résidus » : « l’instinct des combinaisons » « persistance des agrégats » « besoin de manifester des sentiments par des actes extérieurs » s « résidus en rapport avec la sociabilité » « intégrité de l’individu et de ses dépendances » « résidus sexuels ».
B/ Typologie des « dérivations »
Il les classe selon l’aspect subjectif de la force persuasive qu’elles peuvent avoir.
- 1ère classe, : les « simples affirmations »
- 2e classe de dérivations tirent leur force persuasive de l’autorité de certains hommes, de la tradition ou de la coutume.
- 3e classe de dérivations celles dans lesquelles on invoque la volonté d’êtres surnaturels ou la force d’entités métaphysiques ou juridiques.
- 4e classe, les dérivations tirant leur force de persuasion de « preuves verbales ».
Pareto insiste sur le fait que la société n’est pas une personne. Or, chaque individu de la société a une hiérarchie de préférences qui ne correspond normalement pas à celle des autres, ce qui le conduit à distinguer le maximum d’utilité pour une collectivité et le minimum d’utilité d’une collectivité.
B/ La théorie des élites
Tout comme Marx, Pareto est persuadé de l’importance historique et sociale de la lutte des classes déterminée exclusivement par l’économie. Toutefois, Pareto pense qu’une éventuelle révolution prolétarienne n’aura pas pour résultat une domination du prolétariat, mais bien une domination de ceux qui parleront au nom du prolétariat à savoir une élite, une minorité privilégiée tout comme les autres élites.
Pour Pareto, le phénomène le plus important de l’histoire est la mort des élites gouvernantes, des aristocraties. Selon lui, au bout de quelques générations, les élites perdent leur vitalité ou leur capacité d’utiliser la force (cf. Platon, Ibn Khaldoun).
En conclusion, la sociologie de Pareto débouche sur une vision pessimiste de l’évolution sociale dans la mesure où il affirme que la cohérence des sociétés est assurée par des sentiments et non des raisons. Le progrès de la pensée scientifique ne peut que s’accompagner d’un progrès de l’égoïsme qui désagrégera la communauté sociale.
Sur le plan politique, Pareto est souvent accusé d’avoir, par sa sociologie, donné des arguments idéologiques au régime de Mussolini. Cependant, en réalité, Pareto est favorable à un gouvernement à la fois fort et libéral tout en étant profondément attaché à la liberté, tant dans le domaine économique qu’intellectuel.
3/ Max Weber
1864-1920, professeur d’université a publié plusieurs ouvrages de d’histoire économique, a rêvé d’être aussi un homme politique et s’efforcera de convaincre les dirigeants allemands d’éviter une extension de la guerre.
A/ La théorie de la science selon Weber a/ L’action scientifique
Weber part de la distinction des quatre types d’actions : l’action rationnelle par rapport à un but, l’action rationnelle par rapport à une valeur à laquelle on adhère (le capitaine qui se laisse couler avec son bateau pour rester fidèle à l’idée qu’il se fait de l’honneur), l’action affective ou émotionnelle et l’action traditionnelle.
A partir de cette typologie, Max Weber analyse l’action scientifique. Deux conséquences :
- l’affirmation de la nécessaire objectivité du savant - le caractère nécessairement inachevé de la science
Les sciences comme l’histoire et la sociologie sont caractérisées par la volonté de comprendre et d’expliquer les valeurs auxquelles les hommes ont adhéré et les œuvres qu’ils ont édifiées. Ce qui pose tout particulièrement le problème de l’objectivité sur lequel Max Weber insiste tant, et préconise de distinguer entre le jugement de valeur, qui est un jugement personnel, et le jugement subjectif porté sur une chose ou sur un phénomène.
B/ La méthode intellectuelle de Max Weber a/ Le problème de la causalité
Il peut s’agir pour Weber d’une causalité historique : la méthode consiste d’abord à définir avec précision l’entité historique dont on prétend retrouver les causes.
Il peut s'agit aussi d'une causalité sociologique : elle s'exprime alors comme des relations partielles et probables.
Cette théorie de la causalité se veut être une réfutation du matérialisme historique de Marx, dans l'idée qu'aucune science ne peut apprendre à l’humanité quel est son avenir.
B/ Le concept de « type idéal »
Toute sociologie est une reconstruction tendant à rendre intelligible ce qui ne l’a pas toujours été. A partir de cette tendance générale de la sociologie Weber construit la théorie du type idéal : il s’agit d’une reconstruction rationnelle et stylisée d’un élément historique ou social à partir de ses traits essentiels, de ses traits typiques. Pour Weber, le type idéal n’est pas une reproduction exacte de la réalité. Au contraire, la réalité est une réalité décomposée puis recomposée en privilégiant ses éléments les plus typiques
C/ La volonté de comprendre l’existence vécue
Ce qui revient à comprendre les valeurs auxquelles adhèrent et obéissent les hommes. Sur cette question des valeurs, Max Weber s’oppose à Durkheim et à Pareto. Il ne croit pas qu’à travers ces valeurs c’est la société que nous adorons. Pour lui la création de valeurs est non seulement sociale mais historique, les systèmes de valeurs religieux et philosophiques sont non-logiques à bien des égards, mais ils permettent de comprendre le sens que les hommes ont donné et donnent à leur existence.
Weber conduit à distinguer deux morales, deux éthiques :
1/ l’éthique de la responsabilité (l’éthique de l’action), à savoir l’éthique qui se préoccupe exclusivement de l’efficacité.
2/ L’éthique de la conviction : morale qui incite chacun de nous à agir selon ses sentiments sans nulle référence aux conséquences de son action
C/ Max Weber, sociologue de la religion a/ La sociologie du protestantisme
"L’Eglise protestante et l’esprit du capitalisme" (publié en 1904 et 1905) : livre dans lequel Weber montre que la conduite des hommes ne se comprend que dans le cadre de leur conception générale de l’existence.
Il note que les conceptions religieuses peuvent avoir un effet déterminant sur les conduites économiques. La question posée est de savoir si le développement du capitalisme ne s’explique pas par des raisons religieuses. Weber qu’il a été influencé par un facteur religieux, le protestantisme, et plus précisément le Calvinisme, et que la dérivation psychologique de cette théologie favorise l’individualisme et la réussite économique (me croyant est seul face à Dieu et voit dans son enrichissement le signe du choix de Dieu en sa faveur. Or, travailler rationnellement en vue du profit, puis ne pas dépenser ce dernier et le réinvestir constitue le comportement nécessaire au développement du capitalisme.)
Ainsi, Max Weber a montré que l’attitude économique des hommes pouvait être parfois commandée par leur système de croyance.
B/ Les autres études de sociologie religieuse
Weber retrace une histoire religieuse de l’humanité. Pour lui, la religion des primitifs est fondée sur la notion de charisme (qui est assez proche de la notion de sacré). Au départ donc, on trouve dans le monde des primitifs un monde peuplé de sens, un monde enchanté et à l’autre bout de l’histoire, on trouve le monde moderne que Weber qualifie de désenchanter, un monde fait de matière et d’êtres qui sont à la disposition des hommes. L’évolution religieuse de l’humanité est ainsi caractérisée par ce que Weber appelle le « désenchantement du monde ».
Le plus grand responsable du désenchantement du monde est constitué par les progrès de la science (positive, expérimentale et mathématique D’où une crise spirituelle de l’humanité car la science (perpétuellement en devenir) est incapable de donner un sens à la vie des êtres et à leur destinée individuelle.
D/ Economie et société a/ Weber et l’action sociale
Pour lui, l’action sociale est fondamentalement un comportement humain.
Un comportement devient action lorsque l’acteur donne à sa conduite une certaine signification. L’action est une action sociale lorsqu’elle se rapporte au comportement d’autres personnes.
De l’action sociale Weber passe à la relation sociale, situation où on trouve plusieurs acteurs agissants et où le sens de l’action de chacun se rapporte à l’attitude de l’autre. Les relations sociales obéissent à des règles que Weber divise en deux catégories :
1/ les coutumes, règles qui régissent des rapports sociaux régulièrement renouvelés,
2/ les mœurs : règles qui sont tellement intériorisées qu’on les suit sans même s’en rendre compte (devenues une seconde nature).
De l’ordre légitime, Weber passe à la notion de combat : pour lui, les sociétés ne forment pas un ensemble harmonieux. Elles sont faites autant de luttes que d’accords. Le combat est un rapport social fondamental
A ces concepts de base, Weber en ajoute deux autres : les notions de puissance et de domination, ainsi que l’apport de force et le rapport d’obéissance reconnu comme légitime
B/ L’analyse sociologique du politique
Il se fonde sur une distinction entre l’essence de l’économie et l’essence de la politique. Est une action économiquement orientée, celle qui se rapporte à la satisfaction des désirs de prestations d’utilité éprouvés par les individus. A l’inverse, la politique est caractérisée par la domination exercée par un, ou quelques hommes, sur d’autres hommes. Pour Weber, il existe trois types de dominations :
1/la domination rationnelle fondée sur la croyance à la légalité des titres
2/ La domination traditionnelle fondée sur la croyance au caractère sacré des traditions anciennes 3/ La domination charismatique est fondée sur un dévouement hors du quotidien et justifiée par le caractère sacré ou la force héroïque d’une personne et de l’ordre révélé ou créé par elle
La sociologie politique de Max Weber est inséparable de la situation historique dans laquelle il a vécu, Allemagne d’avant 1914. Il ne croit pas à l’idéologie démocratique. Il met au-dessus de toute la grandeur de la Nation et la puissance de l’Etat.
La sociologie de Max Weber constate que le monde est de plus en plus rationalisé par la science, l’administration et les impératifs de la production économique. Mais, cela n’empêche pas la lutte entre les individus, les classes, les nations et les valeurs. Il pense que par-delà la rationalisation scientifique du monde il faut sauvegarder la liberté de conscience qui est, pour lui, l’essence de la dignité humaine.