Histoire de la République - 3
Dernière mise à jour : 26 janv. 2022
Chapitre 3 - La sérénissime république de Venise
L’État vénitien est souvent qualifié de république car les détenteurs du pouvoir, à Venise, sont élus, par opposition aux monarchies où le pouvoir est transmis héréditairement.
Quand naît-elle ? Difficile voire impossible de proposer une date car pour la naissance de Venise, à la différence des autres villes italiennes, n’a pas eu besoin de conquérir sa liberté ce qui ruait pu constituer une entité politique autonome.
La République de Venise fait timidement son apparition dans les textes sous l’appellation de commune (comune, à vérifier, du latin), à l’poque du doge Pietro Polani.
En février 1143 le Doge polani est saisi pour arbitrer une querelle née de la procession des confréries (c’est une schole) dans la cité de Venise. Et le doge au lieu d’arbitrer a convoqué les juges et les sages, c’est-à-dire « ceux qui président le conseil institué en ce temps-là pour l’honneur, le profit et la sauvegarde de notre patrie et auquel le peuple a prêté serment d’obéissance ».
Ainsi, avec le conseil, les sages et juges et le serment, on a là tous les attributs de la république vénitienne.
A partir des années 1140 la commune installe donc ses différents conseils urbains, élus, et confie le pouvoir politique et militaire aux doges (mot italien pour dire « duc », « duche », « dux »).
Nonobstant, à la fin du 13è siècle, la République prend un tour aristocratique. Pourquoi ? La noblesse s’accapare le pouvoir et pour l’affirmer cette noblesse oblige le doge à prêter serment et pour marquer cette nouvelle puissance, la noblesse se lance dans la constitution d’un empire colonial. A quoi va servir cet empire ? Comme à Rome, il sert les intérêts privés des nobles, assure ses intérêts financiers. L’empire commercial de Venise est vaste et sert la noblesse, qui est une noblesse marchande.
Au début du 15è Venise ressemble à une principauté territoriale prolongée par un empire commercial de nature coloniale et les vénitiens qualifient leur principauté territoriale de « comune veneciarum », le « commun des vénitiens ». On voit ainsi que la noblesse, par ce nom, déclare qu’il existe un espace qui lui revient de droit, voire même par nature (cf légende fondation république de Venise). Ainsi Venise devient la dominante et ses territoires, qui lui sont sujets, seront ses dominés.
Pour autant le terme de dominium ne s’impose pas (« le maître »). En effet, chez les vénitiens, le terme dominium renvoie à un vocabulaire juridique des romains ; les vénitiens préfèrent, dans les faits, qualifier leur république de « serenisima segnoria », « sérénissime seigneurie ». Que faut-il entendre par là ? Les vénitiens entendent leur Etat et tout ce qui concerne la chose publique, les affaires publiques (c’est-à-dire les intérêts des nobles). Ainsi l’histoire de la République de Venise est donc celle d’une aristocratie marchande qui a réussis à soumettre le doge à son pouvoir.
I. Le gouvernement de la République
Au départ Venise est une cité dépendante de l’empire byzantin et, comme toutes les cités de cet empire, un agent public est placé à sa tête pour l’administrer et représenter l’empereur localement,. L’agent public byzantin relève de l’exarchat de Ravene (??), c’est donc la plus haute autorité. Ce légat du pape (l’envoyé légal de l’empereur) va profiter de la cirse politico-institutionnelle qui fragilise les empires romains pour affermir son indépendance vis à vis de l’empereur. Cet administrateur va se faire qualifier de dux, de doge, « chef ».
Ce duc, ce chef, va se comporter comme un roi vis-à-vis de ses évêques, dont il fait sine également ses prêtres, son clergé, les églises, etc, de façon générale ses sujets.
La Basilique Saint-Marco est sa chapelle et non pas celle des vénitiens. Il va se mettre, symboliquement à porter les insignes régaliens comme le sceptre, et pourtant ce doge est élu par le peuple assemblé. Il est élu à vie et bien sûr l’élection n’enlève pas le danger qu’on ait à faire à un mauvais doge, un tyran, voire même à une succession dynastique. Il va y avoir des tentatives mais toutes vont échouer.
Quel va être l’un des moyens pour l’empêcher ? C’est dans la séparation de la fortune personnelle du doge de celle de la République. C’est le palais où siège le doge et où il réside également qui est le propriétaire des biens publics (c’est-à-dire le fisc, ou le domaine). C’est un peu ce qu’il se passe avec le roi de France (le royaume appartient à la couronne et non au roi). Ainsi le doge est l’administrateur des biens domaniaux du peuple vénitien.
Vers le 12è, quand la république s’aristocratise, les doge perdent leur sceptre, leur caractère princier. Ils vont être abaissés au milieu des juges et des sages - c’est pourquoi le doge Polani y a fait appel – et vont se mettre à gouverner Venise par le biais du consentement de l’assemblée du peuple. Bref, la montée en puissance de la commune comme entité abtraite et impersonnelle a fait abaisser la majesté du doge.
A. La soumission du doge
L’accaparement du pouvoir du doge par l’aristocratie vénitienne s’est fait progressivement (sur 2/3 siècles) mais on peut voir un point de départ : 1148. Pourquoi ? Le doge dominico Morosoni, au moment d’accéder au dogat, a prêté serment au peuple de Venise (ce qui est extra-ordinaire) et surtout a décrété que tous ses successeurs feront pareil. Ainsi, par ce serment, le peuple vénitien est reconnu comme la source du pouvoir public mais aussi comme autorité supérieure à celui qui le représente et à qui il délègue le pouvoir, source légitime du pouvoir. C’est donc un pouvoir délégué qu’assurent les institutions et le doge.
A partir du 12è le doge, le plus haut personnage de la commune, de la République, va voir son pouvoir renié, limité, va devoir partager son pouvoir avec des institutions collégiales parmi lesquelles le grand Conseil, la quarantia (les « quarante »), le Sénat, on trouve également le Collège et le Conseil des dix. L’opposition de cette aristocratie collective au doge va aboutir à la soumission définitive du doge à la noblesse vénitienne.
Dans la seconde moitié du 12è, les doges, qui comprennent qu’ils perdent leur pouvoir, tentent de le maintenir dans les colonies. Ils considèrent ainsi que certains comtés sont des apanages qui sont réservés à leurs fils, et vont leur donner le titre de comte à ces fils. Et là ça ne passe pas : l’aristocratie, en 1163, exige que l’investiture des comtés soit dorénavant conférée « pour le bien et l’honneur de la commune de Venise ».
Léonardo Michielet dominico morosini, fils de doges, prétendent à la même investiture. Les deux protagonistes vont saisir les sages et les juges pour régler l’affaire. Ces derniers vont profiter de leur puissance d’arbitre pour prendre une sentence originale et ambitieuse. Les juges et les sages déclarent que tout le mal qui frappe Venise vient de la puissance des doges parce qu’ils peuvent concéder les biens de la commune à leur fils sans aucun profit pour la République. Cela pose en réalité un comportement de la commune : celui d’éviter que les doges cumulent de trop nombreux pouvoirs et surtout qu’il ne soit plus libre de disposer des biens publics.
A partir de ce moment-là les institutions vont intervenir de plus en plus systématiquement dans les affaires de la vie publique, notamment en assurant le nerf de la guerre : les dépences publiques.
En 1166, un an après la querelle des investitures, le doge se voit contraint de faire voter de nouvelles règles à respecter ; il reconnaît avoir perdu son droit à nommer des héritiers à la tête des comtés. Quelle est la nouvelle règle d’investiture ? C’est la noblesse qui va choisir son candidat et ce sera aux doges de confirmer le choix de la noblesse locale. Le rythme va ensuite s’accéléer : au 14è le doge continue de recevoir les lettrees et pétitions adressées à la commune mais il perd le pouvoir d’ouvrir seul les lettres, il faut qu’il soit accompagné ; ses conseillers doivent être là pour chaque mesure publique ; de même il perd le droit de sortir seul en public, il est toujours accompagné. Les conseils qui entourent le doge, on le comprend, incarnent la sérénissime République qui surveille, contrôle son doge.
On a aboutit à un système étonnant où le doge, qui préside toutes les assemblées, fait qu’aucune assemblée ne peut traiter de choses importantes sans le doge mais celui-ci n’a aucun pouvoir, il ne peut prendre aucune décision personnelle, ce qui rend complexe la situation à Venise.
Cette situation va créer de nouveaux conflits intérieurs dans l’E. Les doge vont vouloi rlutter contre l’aristocratie qui s’affirmer en lui contestant le fait d’être garant des institutions, et le peuple, de plus en plus pressuré par la noblesse, va prendre de plus en plus le partie du doge.
Cette lutte va se transformer en compôt.
1) La conjuration des nobles
Au début de l’année 1310, selon les chroniques vénitiennes, Marco Querini rassemble ses fidèles et dresse, dans sa propagande, un sombre tableau de la situation de Venise. Pour Querini les réformes ne servent à rien si l’aristocratie n’écarte pas préalablement le doge. En effet Querini est ses fidèles lui reprochent toutes les nouveautés adoptées par le grand Conseil, la guerre contre Ferare (à vérifier) et surtout que les désordres minent la cité. Querini propose de remplacer le doge Gradenigo par son gendre. Ainsi les comploteurs vont se réunir dans le palais du doge. Et le sage Querini répond au coup de force de ses parents en lançant un appel aux institutions. Querini pense qu’il faut se remettre à la justice et non à la violence, il a peur de la guerre civile mais, en bon aristocrate, il se méfie du peuple.
Dans un discours légaliste, juridique, Querini, estimant que toutes les mesures ayant été approuvées et sanctionnées par les conseils, les institutions, alors il faut présenter au juge la destitution du doge et la justification qu’il propose est que la destitution du doge serait une mesure respectueuse de l’ordre antique et du respect des libertés publiques. C’est là qu’on se rend compte du génie des juristes : l’assemblée des comploteurs va avoir recours à la force.
Au matin du 14 juin les conjurés se rendant, armés, au palais du doge, en criant « liberté, mort au doge ». Le doge parvient à contre-attaquer et à disperser les conjurés ; néanmoins c’est le choc, quelque chose est brisé.
2) La conjuration du doge
La tentative de Querini a glacé les relations avec l’aristocratie vénitienne. En septembre 1354 le grand conseil se réunit, élit 5 sages, et rédige un texte constitutionnel que le nouveau doge va devoir promettre de respecter à son entrée en charge. Le grand conseil cherche à limiter le pouvoir du nouveau doge notamment en limitant ses initiatives en matière de politique extérieure. Il interdit au nouveau doge de recevoir les ambassadeurs ; seul, il devra toujours être accompagné de 4 à 6 conseillers et de chefs de la quarante (??). : le pouvoir politique va prendre le pas sur le doge. L’aristocratie profite donc de ce moment de problème pour régler le conflit qui l’oppose au doge. Le nouveau doge élu est le marin Falier, il promet d’observer sa probitio.
Le 17 avril 1355 marin Falier est décapité sur la place publique : la justice est passée par là, elle a châtié le doge pour avoir pris la tête d’un complot. Ses complices sont pendus. Il est difficile de savoir ce qu’il s’est passé dans cette nuit car les pages du registre du conseil des dix sont blanches, les vénitiens ont retiré toute mémoire de l’épisode sauf « non scribatur », « ne pas écrire ».
En 1354 Venise sort très péniblement de la peste noir, un bon tier de la population est morte. Venise est en guerre contre Gênes depuis plus de 4 ans et a subi défaite sur défaite. Venise, qui perd sa population, se retrouve vulnérable face à sa concurrente. Un climat anxiogène pendant lequel le doge Falier va en profiter pour remplacer la noblesse.
A l’entrée du carême il y a un incident, sans importance, qui éclate entre un aristocrate et un populaire, entouré de matelots. Les marins vont menacer l’aristocrate, qui prend peur et avertit la seigneurie que les marins en colère sont en train de s’insurger à cause du désordre en plein Venise. Le doge, convoqué par l’aristocrate, convoque le blessé pour le sermonner en public. Mais en privé le doge lui explique qu’il est hostile aux nobles, qu’ils lui retire tous ses pouvoirs et qu’il a besoin de l’appui du peuple pour renverser les aristocrates. Ainsi le doge explique au marin qu’il préfère la cause du peuple à celle de l’aristocratie. Le doge explique que la hausse des prix n’est pas de son ressort, qu’il dépendant des aristocrates, et qu’ainsi il faut opérer une alliance entre le doge et le peuple contre la noblesse.
Ainsi le doge Falier et son interlocuteur vont convenir d’un plan : ils décident qu’à la nuit tombe du 15 avril 1355 les marins, les ouvriers de l’arsenal de la terrifiante marine vénitienne, les charpentiers, artisans, mais aussi employés du palais ducal bref tous les ouvriers financés par la république se retrouvent Place Saint-Marc et qu’au son de la cloche du Campanille qu’ils massacreraient tous les nobles de Venise, chez eux.
Le doge est acclamé comme seigneur, il dissoudrait le grand conseil ,abolirait la noblesse et confierait le pouvoir à des gens issus du peuple. Voilà le plan : purger la noblesse.
Alors que tout est en place le doge, au dernier moment, décide de reporter le coup d’E. Le problème : le secret est partagé et un noble apprend le complot du doge et demande au doge Falier de convoquer le petit conseil. Le doge ne se méfie pas et accepte. Ainsi, en pleine réunion, le petit conseil décider d’arrêter et de torturer les comploteurs. Il demande également de rassembler les nobles et de sélectionner des gens sûrs. Après des avux arrachés osus la torutre la culpabilité du doge est établie et le conseil des dix condamne à mort Falier. C’est ainsi que le doge est dcapité en place publique, son image et son nom effacé de toutes les représentations des doges de Venise (cf portrait noir à la galerie des doges).
Ainsi la conspiration de Falier signe la victoire sur les nobles. Le grand conseil décide alors d’élire, à la mort de chaque doge, 3 enquêteurs à la mort du doge défunt pour instruire le procès de sa gestion publique et ces enquêteurs ont le pouvoir de passer sous séquestre son patrimoine pour réparer les éventuels dommages portés à la communauté en violation des lois. Le pouvoir revient pleinement à l’aristocratie.
B. La domination de l’aristocratie
L’aristocratie s‘est servie des institutions pour donner Venise, s’est servie des institutions et a écarté le peuple de ses droits.
1) première assemblée où domine l’aristocratie : le grand Conseil.
Il est difficile d’en dater la création. On constate seulement que ce grand Conseil prend de plus en plus de pouvoir au moment où le doge perd les siens. Au départ les membres du grand Conseil sont choisis à raison d’1 par trentaine (nombre d’une paroisse). Ses membres votent à la majorité. Pour renforcer son caractère aristocratique le grand Conseil décide d’imposer à ses membres de justifier que des ancêtres aient déjà siégé en son sein. On ne peut être membre du conseil que si un ancêtre y a déjà siégé. On rajouter ensuite obligatoirement le père et le grand-père, ce qui réduit encore plus.
Avec ces mesures restrictives les membres se transmettent les charges héréditairement. Les enfants mâles y siègent, à partir de 25 ans, même s’ils le peuvent à partir de 20 ans s’ils ont la chance d’extraire du chapeau une des billes d’or mêlée à des billes d’argent au cours d’une cérémonie présidée par le doge le jour de la Sainte Barde (???). A partir de 20 ans, de même, si on a décroché par élection les charges d’avocat car celle-ci permet de plaider devant une des 5 cours civiles du palais ducal et donc, par conséquent, de parfaire ses connaissances dans le droit.
Au recensement de 1493 il y avait maintenant 2600 conseillers (contre 300). Bien sûr tous ne siègent pas, surtout les jeunes, car préfèrent se consacrer à la fortune personnelle. Ainsi la plupart des lois sont discutées et votées par 400 ou 500 conseillers. A la fin du siècle, à peine 1500 électeurs.
Les électeurs siègent par droit héréditaire ; il leur faut juste prouver qu’ils appartiennent à la noblesse et pour ce faire ils n’ont qu’à demande l’attestation que leur nom est inscrit au livre d’or : la république répertorie ses nobles. Pour être électeurs ils ne doivent pas avoir de fonction exécutive de gouvernement.
Ce grand conseil est très important car il vote les lois, nomme à tous les emplois publics et à tous les conseils, soit au total 831 emplois publics de prestige et de gouvernement à la fin du 15è siècle. Le grand Conseil accorde aussi les grâces, agrège de nouvelles familles à la noblesse, déclarer la paix et la guerre, récompense les familles qui se portent au secours de l’E, gère les crises épidémiques, bref intervient partout. La discipline des séances au sein du grand Conseil est confié à des avocats qui vérifient la bonne tenue des séances, se prononcent sur la conformité des propositions de loi et veillent à éviter le broglio, c’est-à-dire l’intrigue frauduleuse.
Le processus électoral, avec le temps, va se compliquer encore plus. L’élection du doge repose sur le tirage au sort de ceux qui auront à proposer des candidatures aux charges publiques. Par ce système d’élection du tirage au sort les vénitiens veulent corriger les imperfections des électeurs, c’est-à-dire faire intervenir le sort, la divine providence, pour limiter l’impact des élections.
En outre celui qui propose un candidat pour devenir doge devient, ipso facto, son garant, et donc va répondre devant la justice de tout dommage que le candidat aura fait à l’E : c’est cadenassé de tous les côtés.
2) Le Conseil des dix
Il est créé en 1310 dans l’émotion soulevée par la conspiration de Querini. A quoi sert-il ? A juger les comploteurs de Querini. Il est composé de 10 conseillers réunis en présence du doge et du petit Conseil, soit 17 personnes, et à ses séances assistent quelque fois les avocats de la commune. On retrouve aussi les accusateurs publics et le ministère public dans les affaires pénales.
Donc le caractère premier est la sécurité de la République, il en est compétent judiciairement, sorte de comité de Salut Public temporaire puisque réunit, au départ, seulement pour juger la conspiration de Querini mais dont les membres ont réussis à se maintenir. Et surtout, plus éloquent de leur maîtrise du droit, à imposer des procédures exceptionnelles à côté du droit commun. Les réunions du Conseil des Dix sont secrètes. Qu’est ce que la sécurité de la République ? Comme elle est continuellement en guerre contre Gênes, Florence, l’empire ottoman ou Byzance, la guerre et la politique de conquête vont rentrer dans ses compétences. De fil en aiguille il va s’immiscer dans les affaires des autres conseils, notamment le grand Conseil, et l’attirer à lui. En assurant la sécurité de la R2pbulique il obtient la main sur la police. Sur la guerre il faut de l’argent, donc aussi sur la question financière, l’ordre public… bref, tout ce qui exige une décision rapide et efficace.
Evidemment le grand Conseil va assez mal vivre cette imposition de ce Conseil des dix, va tenter le limiter les pouvoirs mais ne réussit pas.
A la fin du 15è le pouvoir de ce conseil a encore augmenter. La seule chose qu’il a dut céder est d’installer en son sein une commission permanente de 15 sénateurs, la zonta « pour éclairer et décider en toute matière difficile ».
II. L’organisation de la République
L’organisation du palais ducal suit l’organisation institutionnelle de la République : en effet, la sérénissime république est organisée en étages. Si va tout en haut c’est là où siège le grand Conseil , au deuxième étage. Il est en haut, c’est lui qui a les compétences les plus importantes. Il occupe toute l’aile méridionale et le reste de l’espace, qui n’est pas occupé le grand conseil, est partagé entre le collège, le Sénat et le Conseil des dix. En dessous, au premier étage, le doge, comme le petit Conseil et la quarantia (la quarante). Ainsi ces positions inférieures marquent aussi infériorité de ces institutions. Dans ce premier étage le duc occupe l’aile orientale, et tout en bas, en RDC, se trouve la logia dans laquelle se trouvent les magistrats, les avocats de la commune et les juges (ceux qui font fonctionner concrètement la République et qui reçoivent des ordres du doge et des conseils élus).
A. L’administration de la République
1) Les comicio
Parmi les comicio de la République ont peut citer la quarantia, le Sénat et le collège.
La quarantia est la plus ancienne commission du grand Conseil. Elle est apparue autour du 13è siècle. C’est une cour de justice pénale et civile, une cour d’appel et la principale autorité en matière économique et monétaire. C’est aussi une institution de contrôle du fonctionnement des autres conseils et des magistratures. Les trois chefs de la quarante, composée de quarante magistrats, siègent avec le doge, et c’est le doge + les 3 chefs + le petit Conseil qui forment la seigneurie. Le déroulement d’un procès au sein de la quarante suit des procédures strictes en 6 étapes :
- la dénonciation : si elle est écrite elle doit être signée, portée par un office de police ou par tout autre magistrat.
- le recueil des témoignages : ce sont les preuves qui constituent l’instruction
- l’exposé des affaires devant la cour, l’exposition, après quoi
- l’accusé est présenté à se défendre. Une fois qu’il a plaidé
- la cour vote sur l’appel proposé par les avocats
- l’élection du verdict à majorité, ce qui va rendre exécutoire la sentence.
Le Sénat est un conseil de gouvernement qui apparaît au 13è s comme une commission restreinte du grand Conseil. Il décide en matière de guerre et de paix, de trêve ou de traité, bref de politique extérieure, et comme ces questions soulèvent souvent de grands problèmes financiers et bien il est aussi compétent en matière financière. C’est ainsi le Sénat qui traite affaire avec les pays étrangers, notamment les pays conquis. Au 13è ses compétences augmentent, comme le nombre de sénateurs. Tous les magistrats entrent au Sénat par la voie électorale normale (élection par le grand Conseil), environ, 200 hommes.
Les magistrats qui siègent au Sénat ont des voix délibératives tandis qu’une cinquantaine, les sages du collège, n’ont pas de droit de vote et sont seulement consultés. Le collège plénier se constituer au sein du 14è s, formé de trois commissions de sages se réunissant avec la seigneurie. La plus ancienne de ces commissions est celle des sages aux ordres qui s’étend à toutes les affaires maritimes et de navigation.
La deuxième, la plus importante, est celle des sages du Conseil qui intervient auprès du Sénat comme commission d’experts (celle qui n’a pas le droit de vote, seulement consultés). La dernière est celle des terreferme, ancienne commission dite des « sages à la guerre ».
Le collège plénier prépare les séances du Sénat, examine les propositions de loi, convoque les sessions extra-ordinaires et exécute les décisions votées. Ce collège plénier peut aussi se réunir seul pour examiner des matières spécifiques qui prend le nom de collège du froment ou de collège du sel, car on légifère à ce moment-là sur le grain et le sel.
2) L’administration des territoires conquis
Dans les territoires conquis la République de Venise est représentée par des recteurs, nobles vénitiens qui ont pour mission de rendre la justice selon leur arbitrium, leur arbitrage, en appliquant soit les statuts citadins soit les coutumes locales. Les recteurs sont élus par le grand Conseil et pour les villes importantes ils sont deux. Lorsqu’ils sont deux l’un est le podesta, l’autre le capitaine. Le podesta exerce la juridiction administrative et la justice tandis que l’autre, le capitaine, assurer les compétences militaires et fiscales. Les recteurs sont assistés de camériers, de chambriers, qui gèrent les chambres fiscales qui servent à encaisser les recettes et impôts de la colonies, ordonnent les dépensent et envoient à Venise les tributs. Si en généralement le gouvernement de Venise s’engage à respecter les statuts communaux des territoires conquis, elle ne se prive pas de les réformer de temps en temps. La République, par sa politique de redistribution des charges publiques à la noblesse, cherche à lui rendre une santé financière tout en la servant.
On se rend compte que, puisque ce sont les aristocrates qui gèrent les colonies, d’une esprit de corps, d’une culture du gouvernement qui va souder les colonies entres elles. Ce n’est donc pas étonnant que Venise cherche à rallier les juristes locaux pour intégrer les cités dans son dominium et, en guise de remerciement, leur laisse le soin de gouverner les campagnes et donc le soin de répartir les charges fiscales et la répartition des impôts.
B. Les administrateurs de la République
Le plus ancien est probablement le chancelier. C’est le plus ancien administrateur qui assiste le doge, dès le 9è siècle. A partir du 11è il va se faire aider par des prêtres notaires et va être à la tête d’une curie, d’une cours, qui accomplit au service du doge tous les actes liés à l’activité exécutive et judiciaire. Les questions se complexifient tellement qu’en 1261 est créée la charge de Grand Chancelier, toujours recruté dans les membres du peuple et, dans l’ordre protocolaire, est le deuxième personnage le plus important de la République après le doge.
En 1264, à sa demande, le grand Conseil transmet dans les registres toutes les délibérations votées et discutées. C’est également lui qui va compiler toutes les lois en vigueur et les classer par matière, c’est donc aussi un juriste qui harmonise le droit.
1) Les magistrats
A Venise, les magistratures sont collégiales. En 1264 apparaissent les juges de la commune compétents pour trancher les conflits relevant de la matière fiscale entre la République et les citoyens. En 1273 les textes signalent la présence d’avocats de la commune, chargés de défendre les intérêts de la République devant les tribunaux. L’avocat conserve également l’argent des impôts, des taxes et des amendes. A cette époque les magistrats sont désignés pour de brèves périodes, suivent un véritable cursus honorum. Les procédures de recrutement sont à la fois simples et complexes à cause de la cooptation et parce que les textes imposent une nécessité de représenter les différents quartiers de Venise au sein des différents conseils.
Ceux qui recrutent ces conseillers et magistrats sont les patriciens. Si les principes sont relativement clairs il ne pas de même de l’organisation de la justice et de l’administration. S’ils détiennent les compétences législatives, les magistrats exercent les fonctions exécutives de caractère administratif et juridictionnel. Autrement dit les ordonnateurs sont aussi les exécutants. On comprend donc la séparation des pouvoirs entre compétences générales et spécialisées.
Ainsi les Conseils font les lois qui s’appliquent à toute la communauté et les magistrats, officia (les officiers) n’ont compétence que dans un secteur d’activité précis ou une zone d’activité ou catégorie particulière.
Également, au sein des magistrats, il faut distinguer ce qui sont dans et hors la ville. Dans la ville ils ont surtout des compétences juridictionnelles tandis qu’à l’extérieur ils ont principalement des compétences économiques et financières.
2) Les juges
Les magistrats, au sein de Venise, ont un caractère principalement juridictionnel mais il ne faut pas en conclure que le palais ducal assure les compétences juridictionnelles : ce n’est pas un palais de justice alors même qu’il abrite les procurateurs de Saint-Marc. Les avocats de la communes, les surintendants, les seigneurs de l’armement, les patrons de l’arsenal et tous les officiers compétents pour revendiquer les biens gérés par la communes.
On y trouve, dans ce palais, également les différents tribunaux. Les juges de la République siègent au sein du palais ducal et vont connaître des oppositions entres les citadins de la commune à la commune elle-même. Il y a aussi la vieille justice, qui exerce les compétences juridictionnelles sur les corporations. Ainsi, on le voit, puisque la République exerce la gestion de multiples affaires, il y a une multiplicité des cours de justice. La République accorde son attention à la tutelle des mineurs et des impotents, assure aussi la succession des citadins décédés à l’étranger, contrôle la moralité des témoins présents dans les affaires civiles et pénales, intervient dans le transfert des biens, conserve commercialement les cautions versées par adujcations ?? des navires.
Par cette superposition des compétences il y une superposition des différents magistrats qui s’arrête à la gestion directe des biens parce qu’il y a à ce moment-là des procurateurs qui s’en chargent. L’imbrication des juridictions civiles donne ainsi compétence à plusieurs magistrats dans une même affaire. Ainsi, par exemple, tout litige qui relève de la dot relève de la compétence des procurateurs de Saint-Marc, mais la répétition de la dot après la dissolution du mariage est l’affaire des juge du proprio (??) qui sont également compétents pour (bref, « bordel »). Mais surtout, dans tout cela, c’est qu’il n’y a pas de hiérarchie entre les magistrats puisqu’ils ne sont pas compétents spécialement. Ainsi il est impossible d’introduire l’appel dans la sentence prononcée par le juge.
Le doge Tiepolo institue en 1244 le tribunal de pétition pour délibérer dans les affaires pour lesquelles il est difficile de s’appuyer sur une jurisprudence existante et où le juge, selon sa confiance, doit construire sa norme pour accélérer la récupération des créances. Ces juges sont saisis par la pétition des justiciables. Ce tribunal des pétitions est une cour importante car, rappel, Venise est composée de marchands dont toute la fortune repose sur le système du crédit, des créances. Comme c’est l’existence même de la République de Venise, la cour de pétition a le pouvoir d’appeler des procès en cours, et notamment en cas de défaut de justice. Au 14è s ce tribunal de pétition a le pouvoir d’annuler des actes et écritures notariés.
En 1282 il est attribué à une nouvelle magistrature qui va hériter des affaires jusque là traitées par des juges. Ce sont toutes les affaires relatives aux canaux, aux rives, aux ponts et voies publiques. Ces magistrats ont notamment compétence pour trouver et récupérer les biens publics. Il faut avoir conscience de l’importance car ils défendent le caractère domanial des biens de la République contre les intérêts privés et sont également ceux qui vont chercher à étendre le domaine public de la République. Ainsi, ce sont ces magistrats qui vont conférer aux particuliers la gestion des monastères, des zones asséchées ou des zones à organiser. Bref, c’est toute la tendance matérielle de la République qui est entre leurs mains. C’est également important de noter que les juges à Venise sont également des administrateurs.
Au 15è s, Venise est à l’apogée de sa puissance, elle s’est imposée sur ses rivales italiennes comme le carrefour des principales routes : tout ce qui vient de l’orient passe par Venise. Ainsi sa domination économique l’a conduit à dégrader ses adversaires, y compris Constantinople, sa suzeraine (4è croisade détournée pour piller Constantinople).
A l’extérieur, la République de Venise est une organisation pensée avec le génie de l’expérience – les vénitiens n’ont jamais théorisé leurs institutions – pour faire la guerre économique à tous ceux qui contestent sa domination : Venise est une arme de guerre commerciale.
A l’intérieur les institutions Vénitiennes ont été organisées de manières à exclure le plus grand nombre au profit de la noblesse patricienne, qui est également la noblesse marchande.
Ainsi en gouvernant collégialement la République l’aristocratie vénitienne a agrandi ses pouvoirs et ses profits. L’E vénitien est un instrument au profit des intérêts privés de la noblesse, qui a détourné les institutions républicaines au détriment de l’intérêt collectif.
Chevalier de Jaucourt, l’un des rédacteurs de encyclopédie avec Diderot de D’Alembert. Sur Venise : « c’est un gouvernement mixte qui cache mal celui d’une aristocratie despotique confisquée par des magistrats d’un même corps exécuteur des lois et législateur en même temps car il n’y a pas de contrepoids à la puissance patricienne » (celle des nobles).